Pionnier du graffiti au pochoir dans les années 1970, John Fekner travaille à et avec New York depuis plus de cinquante ans afin d'alerter population et pouvoirs publics de la décrépitude physique et morale dans la ville.
Reprenant à la fois les codes visuels des taggeurs, souvent accusés de participer à la dégradation de l'espace public, et la communication concise de l'art conceptuel, Fekner affiche des mots-signes en grand format dans les espaces marginalisés de New York et de ses banlieues. Cette communication a pour objet la stratégie intersémiotique utilisée par Fekner qui exhorte à la prise de conscience et à la mobilisation à travers sa pratique urbaine à mi-chemin entre le graffiti et l'art conceptuel, avec des slogans poétiques. Les écritures qu'il place depuis les années 1980 sont autant d'appels visuels qui se manifestent presque de manière sonore, ainsi affichés dans un espace abandonné. A l'instar de The Remains of Industry, peint au pochoir sur la façade de l'usine désaffectée Trunz Meat en 1981, ces « cris » lancés in-situ nous mettent face la brutalité humaine vis-à-vis des territoires urbains. Qu'il s'agisse de dénoncer l'expropriation, la pollution, la surindustrialisation ou plus récemment les inégalités sociales, Fekner confronte le passant à la violence faite aux territoires et aux hommes par le recours à des formules courtes et percutantes qui mettent en avant le lieu et son histoire.
Cette communication prend en compte les réalisations de Fekner d'un point de vue intersémiotique, et il s'agit d'observer le fonctionnement de ces mots-signes sur les plans visuel et sonore par leur force élocutoire en reprenant les codes de la communication officielle, de la publicité et de la poésie. Bien que Fekner n'ait jamais atteint une grande renommée internationale, ses réalisations ont eu une influence majeure non pas tant sur les politiques environnementales à New York mais sur un art de la ville plus engagé dans les dimensions sociales et environnementales.